L’Humanité du 16 décembre 2011, “Quand France 3 collabore à la réhabilitation de Renault”, par Stéphane Guérard

Capture d’écran 2015-12-28 à 10.23.09C’est un scandale!

Quand France 3 collabore à la réhabilitation de Renault

Mercredi soir, l’émission Histoire immédiate 
a offert une tribune 
de premier choix 
aux héritiers de l’industriel collabo.

Mercredi soir, en regardant France 3, on a pleuré dans les chaumières. Non pas de tristesse à l’écoute de la petite fille de Louis Renault, qui a tenté de réhabiliter son grand-père au lourd passé collaborationniste. Mais de colère de voir une chaîne du service public se prêter à la vaste entreprise de réécriture de l’histoire menée par voies médiatique et judiciaire par les ayants droit de Louis Renault, avec dédommagements sonnants et trébuchants ­escomptés. On peut se tromper une fois. 
Mais quand il s’agit de la troisième ­invitation du genre depuis janvier sur France ­Télévisions, on n’est plus très loin du plan de communication.D’autant plus quand on étudie les personnes ­invitées sur le plateau de l’émission Histoire immédiate. Là encore, c’était à pleurer. Au côté de deux éminents historiens qui ont passé leur temps à répliquer : « On n’a pas tous les éléments suffisants pour répondre » ou « La question paraît simple mais la réponse est très compliquée », Hélène Renault-Dingli, petite-fille de Louis, et Laurent Dingli, mari de celle-ci et historien forcément objectif car « astreint à avoir plus… enfin, autant de rigueur que les autres historiens », jouaient sur du velours. La première trouve que, « à la relecture de l’histoire », les faits de collaboration reprochés à son grand-père « sont plus nuancés que ce que l’on a voulu dire depuis des années ». Le second s’emporte lorsque l’on oppose l’attitude de Jean-Pierre Peugeot à celle de Louis Renault : « Sans limiter les mérites de la famille Peugeot, il faut juste rappeler que Peugeot était pétainiste militant et qu’il est entré en résistance qu’en 1943. »

Face à ce duo donc, aucun débatteur contradictoire. Et surtout pas l’historienne spécialiste de la collaboration économique Annie Lacroix-Riz, qui a mis notamment en lumière que « l’orientation de Renault, dès 1933, vers la nécessité d’entrer dans un cartel essentiellement franco-allemand », qui l’a conduit « dans la collaboration de long terme ». On a juste eu le droit à un présentateur sirupeux avec la petite fille Renault (« Vous avez souffert pendant votre enfance ? », « Qu’est-ce qui explique un tel acharnement ? ») qui affirme, au détour d’une question, « qu’on pourrait imaginer qu’un non-lieu pourrait être rendu » si procès de Louis Renault il y avait. Désastreux.

Stéphane Guérard

Lien vers l’article de L’Humanité

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.