Source : A.N. Z 6NL 9
(…) En l’état de nos constatations, il apparaît :
Que la Société n’a pas procédé, pendant l’occupation, à la fabrication de chars ou chenillettes d’infanterie neufs de sa marque.
Que les autorités allemandes lui ont demandé d’assumer la réparation des chars Renault, dès le mois de juillet 1940 ; mais que ces travaux de réparation ont en définitive été effectués dans deux ateliers réquisitionnés à cette fin et placés sous direction allemande.
Qu’elle a exécuté des commandes de pièces de rechange qui lui ont été passée par cette Direction,
Qu’elle a également fourni des pièces de rechange à la Direction allemande qui assumait la réparation de chenillettes d’infanterie, type U.E., dans un atelier réquisitionné sis à Issy-les-Moulineaux
Enfin qu’elle a effectué des fournitures de pièces de rechange pour chars ZM et chenillettes U.E., au titre de deux commandes qui lui ont été passées par l’armée allemande (…)
D’une lettre adressée par la Société au Directeur du C.O.A. le 9 décembre 1940, il résulte que les pièces de rechange pour chenillettes d’infanterie fournies à partir du mois d’août 1940 à l’organisme allemand qui réparait ces véhicules à Issy-les-Moulineaux ont d’abord été prélevées sur les stocks qui avaient été approvisionnés pour les marchés passés pour le Gouvernement français ; et qu’avant de mettre en fabrication de nouvelles pièces, comme suite à l’épuisement des stocks correspondants, la Société a demandé au C.O.A. de lui faire savoir s’il était d’accord sur l’exécution de ces commandes (original scellé n°2. Pièces disposées par le ministre de la Production Industrielle) : elle donnait dans cette lettre à titre d’exemple la nomenclature de pièces dont elle venait de recevoir commandes. Le 11/12 (original même scellé) elle avisait le C.O.A. qu’elle venait de recevoir une nouvelle commande du même chef et posant la même question. A ces lettres le C.O.A. a répondu le 17/12 (même scellé) en donnant son accord, sauf visa préalable de la Zast comportant attribution des matières premières correspondantes.
Les commandes relatives aux fournitures à l’armée allemande de pièces de rechange pour chars ZM et chenillettes U.E. ont également été soumises aux C.O.A. : le 15 janvier 1941 (original même scellé) la Société avisait en effet le Directeur de ce Comité que le Commissaire allemand Schremmer lui avait remis deux listes de pièces de rechange pour chars ZM et chenillettes U.E., dont il envisageait de lui passer commande : elle précisait que le montant total de ces listes pouvait être évalué au cours de l’époque à 140.000.000 (de) francs environ ; que les pièces seraient destinées au parc de Gien et que les contingents de matière seraient alloués par les soins de la Zast. Elle demandait au Directeur du C.O.A. de lui faire connaître le plus tôt possible si elle pouvait donner suite à cette demande à laquelle elle devait elle-même répondre dans les moindres délais. Des pièces figurant au même scellé il résulte :
Que le C.O.A. a transmis le 22 janvier copie de la lettre de la Société à M. l’Ingénieur général Norguet, Ministre de la Production Industrielle, en lui demandant de lui faire connaître ses directives sur la suite à donner à cette affaire.
Que le ministère de la Production Industrielle a donné son accord sur l’acceptation et l’exécution des dites commandes, accord que le C.O.A. a notifié à la Société le 6 février 1941.
Les pièces faisant l’objet de ces commandes auraient dû, selon (les) clauses prévues à l’origine, être intégralement livrées au cours de la période du 15/6/41 au 15/6/42, délai qui n’a pas été observé ; des dispositions ont été prises pour la liquidation de ces marchés, en l’état, au début de 1944 ; ceux-ci n’ont en définitive pas été intégralement livrés.
Nous signalons par ailleurs que l’armée allemande a également passé à la Société :
Les 14/12/42, 5/2/43 et 12/7/44, 3 commandes de pièces de rechange pour chars R.35 dont les montants respectifs ressortaient à FRS 1.110.216 ; 1.755.600 et 1.526.057 ;
Le 23/5/44, 1 commande de pièces de rechange pour chenillettes U.E. d’un montant de 2.262.515 ;
Le 14/11/41, 1 commande de pièces de rechange pour chars B1 (FRS 17.586.055).
Ces commandes n’ont donné lieu à aucune livraison ; celles des 14/12/42, 5/2/43, ont été annulées au début de 1944, et celle du 14/11/41, le 26/5/43 (…)
Des documents placés sous scellés, il résulte que le Commissaire allemand, prince von Urach a, à deux reprises, demandé à la direction de la Société d’étudier la possibilité d’appliquer un horaire de 54 heures.
Le 3 décembre 1942, il adressait à celle-ci une note (traduction scellé 14), dans laquelle, se référant à une ordonnance du fondé de pouvoir général pour la main-d’œuvre, il lui demandait de vérifier dans quelle mesure la semaine de 54 heures pourrait être appliquée et attirait son attention sur le fait qu’en raison du manque de main-d’œuvre plusieurs machines devraient être conduites par le même ouvrier.
Le 17/11/43 (même scellé), se référant à une conversation qu’il avait eue avec M. Louis, directeur de la production, au sujet d’une augmentation du rendement, il demandait de rechercher comment cette augmentation pourrait être réalisée par l’application de mesures internes, tels des déplacements de main-d’œuvre et l’augmentation de la durée du travail pour la porter à 54 heures.
Ces demandes sont demeurées sans suite (…)
Aucune dividende n’a été attribué aux actions ordinaires, ni aucun tantième au Conseil d’Administration.
Aucune répartition n’a été faite au titre de l’exercice 1942, ni a fortiori de l’exercice 1943 (…)
Le chiffre d’affaires des années 1941 à 1943 est afférent pour partie à la liquidation de marchés de guerre passés antérieurement à juin 1940 avec le Gouvernement français. Les montants qui ont été incorporés à ce titre dans les produits de l’exploitation des exercices précités sont les suivants :
1941 : 45.115.308.00
1942 : 43.287.548.92
1943 : 87.177.434.27
175.580.291.19
Les charges d’exploitation concernant la dite liquidation… se seraient élevées d’après les indications qui nous ont té fournies à 75.000.000 environ. Sur ces bases, les comptes des exercices 1940 à 1943 comporteraient du chef d’opérations étrangères à l’exploitation postérieure à l’armistice, un profit net de l’ordre de 100.000.000.
d) On remarquera enfin, pour s’en tenir aux observations les plus importantes que les bénéfices d’exploitation ressortant des comptes des quatre exercices 1940 à 1943 sont afférents pour partie à des profits de caractère financier, indépendants de l’exploitation industrielle et commerciale (Dividendes et intérêts divers).
Que les résultats nets de l’exercice 1940 ont été considérablement affectés par la constitution d’importantes provisions, sans rapport direct avec cette même exploitation ou résultant de circonstances exceptionnelles (provision pour dépréciations du portefeuille-titres, pour marchandises en route lors de l’exode, pour risque de guerre),
Que de la même façon les bénéfices de l’exercice 1941 ont été à concurrence de FRS 88.440.000 affectés à la Provision pour risque de guerre,
Que les profits de l’exercice 1943 résultent pour 20.000.000 environ de l’annulation de provisions antérieurement constituées devenues sans objet (…)